Au commencement était le jour.
Soleil, ombre, lumière, tour à tour sur leurs dos ailés. À L'aurore, le plumage rougit dans le silence murmuré de la faiblesse du vent. Ils se rassemblent, ivres de liberté, dessinant le ciel de leur langage improvisé. L'arbre est un être fidèle qui permet le repli nécessaire, forêt protectrice où se reproduire parfois en cachette. À son origine l'homme est complice de l'oiseau. Nu, debout, allongé, il danse au rythme d'une énergie cosmique. Attentif aux sons, il imite les mélodies et compose, il est alors tout entier corde vibrante et tuyau sonore. Mais au fil du temps, les amis s'éloigneront dans la marche forcée du monde, où l'arrogance de maitriser le vivant domine. L'oiseau perdu crie sa détresse! Où peut-il s'abriter quand il remonte de la lointaine Afrique? Où peut-il se reposer? Sur les pierres trop chaudes des volcans d'Islande quand le glacier disparait en mer? L'oiseau et le glacier seront-ils encore visibles demain? Repris comme un objet précieux, l'oiseau dans son cadre défie le temps, marque une pause. La photographe, Christine Lefèbvre est à coté de Walter Benjamin pour nous rappeler que le déclin ne signe pas la disparition. Par la présence de ses images, elle nous propose un réveil et engage notre sommeil vers une douceur esthétisante. Se promener dans sa narration visuelle, c'est ouvrir un chemin et offrir une fenêtre à nos yeux, oublier le vide qui parfois nous éblouit. "Les lucioles n'ont disparu qu'à la vue de ceux qui ne sont plus à la bonne place pour les voir émettre leurs signaux lumineux. » Didi Huberman Martine Chapin - La chambre claire Galerie - Mars 2024 |
© Christine Lefebvre |
« Dans ce monde que je ne comprends pas, à la lumière fragile de l’aube, faire des images qui fuient le vacarme et la tyrannie des gigas, tenter de rendre compte de la dimension sacrée de la Terre, en célébrer la force et les mystères. » Christine Lefebvre
Les ouvrages de Christine Lefebvre sont des voyages que l’on attend. Fortement marqué par ses inspirations littéraires, le nouveau livre de la photographe belge « Chroniques de l’oiseau perdu » est à la fois une odyssée enchanteresse où les paysages immémoriaux sépia, les forêts mythiques côtoient les récits merveilleux. La nature nous offre ce qu’elle a de plus sensible et ses éléments jouent avec nos sens. Les créatures féminines et héroïnes légendaires ne sont jamais bien loin. La magie opère… Extrait du site de 9lives-magazine |
"Lors de ses promenades, loin de la ville et des hommes, ce que la photographe sent monter comme une sève au contact d’un arbre, d’une falaise ou d’un glacier se fixe à main levée, en quelques secondes et par fragments impulsifs." Marguerite Pilven pour "Les chroniques de l'oiseau perdu" paru aux Éditions Filigranes.
...
Chroniques de l’oiseau perdu est donc un manifeste, sans tonitruance, envers la possibilité de vivre au Paradis ici et maintenant, en ces territoires, extérieurs autant qu’intimes, où le social et ses maléfices n’ont pas de prise.
On écrit, on photographie, on compose de la musique, on danse, pour atteindre, dans l’épreuve de l’art, ce point indemne en nous qui est notre fondation, notre irréductible présence, notre souffle de vie premier.
A quoi bon créer si ce n’est pour sauver son âme et la sentir vibrer à l’unisson du grand Tout, ce panérotisme originel si bien décrit par Platon ?
...
Extrait du site L'intervalle de Fabien Ribery
Chroniques de l’oiseau perdu est donc un manifeste, sans tonitruance, envers la possibilité de vivre au Paradis ici et maintenant, en ces territoires, extérieurs autant qu’intimes, où le social et ses maléfices n’ont pas de prise.
On écrit, on photographie, on compose de la musique, on danse, pour atteindre, dans l’épreuve de l’art, ce point indemne en nous qui est notre fondation, notre irréductible présence, notre souffle de vie premier.
A quoi bon créer si ce n’est pour sauver son âme et la sentir vibrer à l’unisson du grand Tout, ce panérotisme originel si bien décrit par Platon ?
...
Extrait du site L'intervalle de Fabien Ribery
© Christine Lefèbvre
|
"Pour son premier livre (L'Entre Temps chez Filigranes Editions), Christine Lefèbvre fait montre d’une grande maîtrise formelle et poétique, pensant son ouvrage comme une traversée des champs inférieurs. La nuit est profonde de laquelle émergent des icebergs, des névés, des entités orphelines, des nymphes dressées, courant, couchées, mystérieuses comme des gemmes de glace. Chaque présence est une grâce, une terreur, un instant de désir pur, un effondrement possible. Un oiseau blanc s’envole, c’est un triangle battant l’espace, un sexe féminin intouchable ayant pris le chemin des airs." Extrait du blog de Fabien Ribery "L'INTERVALLE" - Publié le 13 décembre 2017 https://lintervalle.blog/ www.christinelefebvre.be/ |
« L’Entre Temps » est une réflexion sur le temps et ses altérations… source de beauté imparfaite. Au Japon, on appelle cela Wabi- Sabi. Percevoir les vibrations et harmonies du temps, en explorer les interstices et les cicatrices. Ces images témoignent d’un besoin profond pour moi : celui d’être en harmonie avec la nature . Entre 2010 et 2015, j’ai parcouru les terres d’Islande et de Chine rurale, orientant ma recherche sur le temps géologique. Celui qui pose son empreinte sur chaque parcelle végétale et qui voit la nature s’ancrer, se transformer. Des paysages millénaires (déserts, glaciers, roches) ont constitué le champ de mes premières expériences. Il y eut ensuite cette merveilleuse rencontre, qui fut pour moi une révélation. C’était à Madagascar, une personne marchait devant moi et je l'ai suivie, sans savoir vraiment pourquoi. " Surtout ne te retourne pas!" Sa peau était fripée comme le tissu, son dos ramifié, marqué par la vie, ses cheveux gris et cependant, le contour de son corps, ses petites tresses juvéniles en forme de lyre représentaient la petite fille encore en elle. Elle se tenait très droite et portait son âge avec dignité, dans l'acceptation du temps: BEAUTE ABSOLUE! Son dos m’était révélé tel un paysage. Le lien était fait entre le temps géologique et le temps biologique, gravant ses stigmates en chacun de nous. Ce fut le début d’une longue série de photographies, déclinaisons de dos, de paysages, attestant de la similitude, de la rencontre entre ces 2 mondes. Christine Lefèbvre De nationalité belge, Christine Lefèbvre vit et travaille à Bruxelles.
Elle a étudié la photographie à l’académie d’Ixelles (2005-2009) Christine Lefèbvre utilise exclusivement l’argentique et réalise elle-même ses tirages. Aux royaumes élyséens de Christine Lefebvre, photographe Publié par FABIENRIBERY le 24 MAI 2019 sur son blog l'Intervalle Les photographies de Christine Lefebvre sont des œuvres de silence. Il y a du bruit, des bavardages, des communications incessantes, et soudain, sur le mur métamorphosé, des rectangles de vision en noir et blanc créant de la stupeur. Les affaires du jour paraissent insignifiantes, nous voilà ramenés à l’essentiel : la permanence des formes à travers le temps, le mystère de toute présence, l’énergie des choses premières. Des aigrettes s’envolent. Pourtant, regardez-les bien, ce sont des points fixes attirant tout l’espace à elles. La beauté n’est pas une petite histoire personnelle, mais bien au contraire ce qui nous relie profondément, au-delà des querelles identitaires et des fausses antinomies. Qu’elle soit en Islande, dans une campagne française ou quelque part du côté de l’Asie, Christine Lefebvre se rend disponible à ce qui vient comme aux traces de l’immémorial. Les structures géologiques sont pour elle un parchemin, de la même façon qu’elle perçoit un dos de chair humaine comme un livre sacré. Par respect pour les névés, les paquets de sable, le vent et le génie des forêts, il faut se mettre nu, frotter sa peau à la peau des roches et des arbres, retrouver sous la carapace de l’adulte accablé par les responsabilités l’enfant qui goûte la terre et se fait un manteau de boue. Des photographies de Christine Lefebvre sourd le sentiment d’un ordre supérieur, informé des forces telluriques présidant à toute véritable naissance. Quelle différence entre un oiseau blanc, une chute de neige et le dos d’une belle amie ou d’un bel amant laissant l’Hasselblad le caresser de matière argentique ? L’éphémère rencontre l’atemporel dans une perception très sensualiste du monde. La pudeur comme le secret sont érotiques, et il n’y a pas d’imperfection pour qui sait regarder longuement la géométrie du vivant. Entrons donc avec Christine Lefebvre aux royaumes élyséens, qui ne sont pas d’outre-tombe, mais d’ici et maintenant, et de toujours. Les femmes ont des regards de glace qui brûlent le papier, voilà pourquoi nous ne les verrons généralement que de dos, oiseaux de nuit, perles de jour, habitantes des rives de l’imaginaire, femmes à embrasser et à perdre, à perdre en les embrassant. Ce sont des cariatides vous offrant mieux que leur sexe, leur vulnérabilité, et leur puissance. Fabien Ribery Ce texte paraît à l’occasion de la première exposition de La chambre claire Galerie (Douarnenez, Finistère) ayant confié ses clefs à Christine Lefebvre – du 1er juin au 13 juillet 2019 Vernissage samedi 1er juin en présence de l’artiste à partir de 18h30 |
Eurydice surgit seule, elle ferme la marche des paysages du livre de Christine Lefèbvre, « L’entre temps », qui ne lui demandera pas de se retourner. Son identité n’est pas la question. C’est le mouvement des lignes, les courbes de la chair, les plis de la peau, le jeu de la chevelure, le temps qui marque le corps, le désir qui se livre en douceur, que le regard retient.
Orphée n’est pas là. Eurydice ne peut disparaitre. Elle souligne et rappelle les autres dos. Dos vaporeux, nonchalants, langoureux, debout, couchés, ils sont ouverts sur une tendre douceur. Dos intouchables mais enveloppés dans une rondeur souterraine, liés au magma. Dans leurs courbes énigmatiques, ils flottent, se pensent par une nuque en toison, échos à l’abondance des feuilles, bois et nervures des arbres qui les accompagnent, ils s’opposent à la pierre qui surgit d’une masse lumineuse. Par petite touche la vie s’envole, dryades libérées du sol, livrées au hasard de l’inconnu. Le chemin que nous propose Christine Lefèbvre nous entraîne dans un paysage impossible à habiter et doux à rêver dans une tendre solitude. « Ce que nous savons le moins d’un autre être, c’est comment il souffre » remarque Paul Drouot dans son livre, Eurydice deux fois perdue. Ici au delà de la souffrance, c’est le tangage de la beauté paisible que ces images impriment dans notre mémoire. Martine Chapin - La chambre claire Galerie - 2019 Principales expositions
Principales publications
|